Triptyque DANGER, Résidence Jeune Création, Espace Icare, Issy-les-Moulineaux, 2008

Création.

Textes de Tankred Dorst, Slawomir Mrozek et Pierre Terzian. Mise en scène, scénographie et création sonore : Pierre Terzian. Lumières : Éric Julou. Avec David Braun, Christophe Carassou, Sophie Keledjian, Marianne Lewandowski, Caroline Mounier, Raphaël Ponsich, Emmanuelle Proffit et Pierre Terzian. Photos : Jean-Philippe Brun. Production Théâtre du Désordre, avec le soutien de l’Espace Icare.

Antoine Mouton, écrivain, sur Triptyque Danger :« Triptyque Danger, c’est la collision de trois spectacles, La grande imprécation devant les murs de la ville de Tankred Dorst, En pleine mer de Slawomir Mrozek, et À manger pour les cailloux, un texte écrit par le metteur en scène. Trois intrigues ayant pour trait commun d’être en suspens (une femme veut récupérer son mari mort à la guerre, trois hommes doivent désigner l’un d’entre eux pour un repas cannibale, une femme enceinte est enfermée dans un appartement) – des spectacles dialectiques, basés sur l’espoir d’une improbable résolution (une résolution qui sera, de toute façon, un déchirement, un déplacement du sens moral).Sur le plateau, un homme est là qui veille à la poursuite du spectacle, qui parfois vient en briser le déroulement, ordonne aux acteurs de répéter certaines scènes, prenant le risque de la hachure, de la redite, du heurt, privilégiant le cérémonial plus que l’histoire (on pourrait dire : privilégiant l’histoire du cérémonial). Mises en abîme de la création théâtrale ouvrant les possibilités multiples du récit et de sa représentation.

Ce n’est pas un théâtre fabulateur, immédiat, racoleur – c’est un théâtre qui interroge la fabrication de la fable. On sent un danger, des doutes, des difficultés – on sent que tout pourrait aussi bien s’arrêter – aussi les moments qui « prennent » sont autant de moments de joie. Ils « prennent » mais continuent d’être attaqués, ils résistent et s’imposent. Du questionnement, on passe à l’évidence. La position du spectateur est déplacée : acceptant de ne pas suivre un cours linéaire, il devient complice (ou critique) d’une logique qui se présente à lui.

Nulle transcendance – tout est mis sur un même plan : facteurs sociaux et politiques, psychologiques et esthétiques, aucun ne domine, tous dialoguent. Car c’est l’absence d’ordre divin qui permet au sens de se démultiplier, comme un objet entre deux miroirs, à l’infini. Un sens jamais clos, une infinité d’essais ; le théâtre de Pierre Terzian n’est ni bavard ni baroque ; seulement, il n’est pas limité. Il ouvre des champs inattendus de langage et de jeu, et se déploie en se réfléchissant. »